South Survivors - Merle's adventures

Presque plus personne n'avait de montre, désormais, mais de toute façon, même avant l'épidémie, Merle n'en portait pas. Il se foutait de la ponctualité, et il avait une bonne horloge interne.
Il devait être quelque chose comme deux heures de l'après-midi.
La prison était à une trentaine de kilomètres, un bon marcheur comme lui pouvait espérer les parcourir en moins de six heures, s'il ne rencontrait pas de problèmes en route.
Ce qui voulait dire qu'il pourrait peut-être y arriver avant la nuit.
Sinon, peu importe, marcher dans l'obscurité ne l'effrayait pas.

Ce qui l'effrayait, par contre, c'était l'idée que Judith ne tienne pas le coup.
Il n'avait aucune idée de la vitesse à laquelle une maladie aussi grave pouvait emporter un bébé de son âge. Il essayait de ne pas y penser, mais il ne pouvait pas s'empêcher d'imaginer Judith mourant en route, comme ça, dans le harnais, contre lui.
Peut-être qu'il ne s'en rendrait même pas compte ? Peut-être qu'elle se réanimerait et que c'est seulement là qu'il s'apercevrait....

"Putain, stop !"

Il avait presque crié.

"Merde, arrête de faire ta fiotte, bordel !T'as mieux à faire que d'te pourrir le cerveau avec des conneries !"

Pourtant, il ne pouvait pas s'empêcher de glisser fréquemment sa main dans le harnais, juste devant la bouche de Judith, pour sentir le souffle léger de sa respiration.
Elle était endormie, probablement épuisée par la fièvre. De temps en temps, elle toussait dans son sommeil. Elle tenait toujours le petit animal en tissu.

P'tite Botteuse de Cul, c'était comme ça que Daryl l'appelait.
Daryl... c'était vraiment le plus gentil d'eux deux.
Il aimait vraiment la petite Grimes, il la prenait souvent dans ses bras, il jouait avec.
Quand Merle voyait ça, ça lui faisait toujours drôle.
Pourquoi il avait jamais eu de gosses, Daryl ? Bonne question.
Lui-même savait parfaitement pourquoi il avait décidé de ne pas en avoir, mais pour son petit frère, c'était plus mystérieux. Surtout quand on voyait à quel point il prenait plaisir à être avec Judith.
Ouais, faudrait vraiment qu'il lui pose la question, quand il le reverrait.

"Ma p'tite demoiselle, c'est l'moment où jamais de mériter ton surnom."

La température de Judith ne cessait de grimper. Il était vraiment important pour Merle de se dépêcher un peu plus. En effet, elle ne tiendrait pas longtemps ainsi. Malheureusement, la route était infestée de rôdeurs qui n'aider pas vraiment la quête de Merle. Soudain dans les feuillages, une femme surgit. Merle la pointa de sa baïonnette. Elle leva les mains.

"Merle... Judith..."

Maggie était là. Elle retournait vers les pas de la prison pour voir si Glenn ni était pas. Après le désastre du bus, elle avait laissé Bob et Sasha dans un lieu sûr. Ils n'étaient pas au courant de son départ pour la prison. Elle ne voulait pas mettre leurs vies en péril, sachant qu'elle revenait sur un lieu fantôme, qui était blindé de rôdeurs. Un havre de paix qui tourne en un cimetière, rempli de mort.
Maggie s'approcha de Judith et toucha son front. Elle était brûlante.

"Ne me dis pas qu'elle..."

Elle posa ses mains sur sa bouche, elle était surprise. Une boule d'angoisse se forma dans son ventre.

"Tu étais seule avec elle ? Comment vont les autres ? Tu as vu Glenn ?"

Merle la repoussa fermement de la main.

"T'approche pas."

Le dernier truc dont il avait besoin, c'était d'une malade supplémentaire.

"J'ai vu personne, à part Michonne et Emi, on a quitté la prison ensemble. Il s'est mis à pleuvoir des emmerdes, Emi est tombée malade, et puis Judith. Les filles sont restées ensemble."

Il avait décidé de servir à Maggie la version courte. Celle où il n'abandonnait pas Emi seule comme un chien.

Il n'y avait pas grand monde à la prison qui l'appréciait, mais ce qui était sûr, c'était que Maggie était l'une de ceux qui l'aimaient le moins.

Difficile de le lui reprocher... leur première rencontre s'était soldée par la lame de sa baïonnette pressée contre la gorge de la jeune femme.
Difficile après ça de repartir sur de bonnes bases.

Elle et Glenn n'étaient pas les seuls prisonniers à être passés par Woodbury, et Maggie n'était pas l'unique femme a s'être retrouvée aux mains du Gouverneur ainsi.
Est-ce Merle approuvait ce genre d'agissements ? Non.
Est-ce qu'il pouvait y changer quoi que ce soit ? Non plus.

Merle savait que Glenn ne lui avait jamais pardonné. Il avait fini par tolérer sa présence au sein du groupe à cause de Daryl, de Rick, des autres... mais en aucun cas il ne le considérait comme l'un des leurs.

Savoir ce que Maggie pensait, elle, c'était plus compliqué.
Elle ne l'aimait pas, ça c'était sûr. Mais le haïssait-elle ? Dur à dire.
Elle l'évitait et ne lui parlait pas en général, ce dont il était très loin de se plaindre.

Mais il n'était plus temps aujourd'hui de ruminer les vieilles querelles.
Il était content d'être tombé sur elle, parce qu'il savait qu'elle était fiable, et capable de se battre.

"J'ai pas d'temps à perdre à bavarder, pour la p'tite, ça urge. J'retourne à la prison, c'est l'seul endroit où j'suis sûr de trouver c'qu'y lui faut. Retrouver ton Chinois préféré, ça attendra", déclara-t-il péremptoirement.

Il refusait d'avoir à terminer la journée avec un petit cadavre à enterrer.
Pas question.

Il en avait assez de voir mourir tout le monde autour de lui.

"À l'heure actuelle, on ne doit pas se séparer. Bob et Sasha sont en lieu sûr. Je ne veux pas laisser Judith. Donc, je t'accompagne. Mais on se dépêche et après on va chercher mon Chinois préféré comme tu dis."

Elle emboîta le pas avec assurance, tuant des rôdeurs qui sortaient par-ci, par-là.

"Je garderai Judith pendant que tu iras chercher les médicaments. On ne doit pas risquer la vie de Judith."

Elle avait bien insisté sur "la vie de Judith". En effet, elle était plus importante que celle de Merle. Elle ne lui avait toujours pas pardonné le désastreux séjour à Woodbery. Mais lorsqu'il avait dû revenir à la prison, après avoir était énormément blesser, la pilule était passée. Bien qu'elle ne lui adressât pas vraiment la parole, elle acceptait -presque- sa présence. Le seul qui l'appréciait réellement était son père.

Ils étaient presque arrivés à la prison, mais ils s'arrêtèrent bien avant pour élaborer un plan. C'était bien trop dangereux de se jeter ainsi dans la gueule du loup.

Dans le ciel, un énorme nuage de fumée noir se forme. Les oiseaux s'envolent à l'opposer de ce nuage. Il est là depuis plusieurs jours mais personne ne s'en est réellement rendu compte à cause des événements tragiques des derniers temps. Il s'approche de plus en plus des groupes de survivants.

"Je garderai Judith pendant que tu iras chercher les médicaments. On ne doit pas risquer la vie de Judith."

Merle poussa une sorte de grognement méprisant.

"Elle est avec moi, elle y reste."

La petite était déjà en danger de mort de toute façon. La tenir éloignée des rôdeurs n'avait plus vraiment de sens.

"Tu crois p't'être que tu vas rester ici à jouer la baby-sitter tranquille pendant que j'risque mon cul tout seul là-d'dans ? Tu viens avec moi et tu t'actives les miches.En plus, tu sais mieux qu'moi où ton père a foutu les médocs."

N'attendant même pas sa réponse, il lui tourna le dos et chercha des yeux un endroit où s'assoir.
Il venait de marcher au moins cinq heures sans s'arrêter, et le seul truc qu'il avait eu dans le ventre en trois jours, c'était un œuf.
Il avait besoin d'une pause avant de prendre d'assaut.
Et Judith avait besoin de boire quelque chose, dans son état, avec la fièvre, elle risquait de se déshydrater très rapidement.

Merle retira le sac à dos de ses épaules et en sortit le reste de biberon qu'il lui avait préparé plus tôt dans la journée et qu'elle n'avait pas terminé.
Il eut un mal de chien à la réveiller suffisamment pour la persuader de boire un peu.
Voir la petite aussi misérable lui faisait mal au cœur... S'il avait été tout seul avec elle, il lui aurait parlé, aurait caressé ses petits cheveux tout fins.
Mais, devant Maggie, son orgueil le retenait.

"On dirait que le temps se couvre..." fit remarquer Maggie.

Merle haussa les épaules, et se retourna vaguement.
La vue du nuage le fit se raidir d'un seul coup.
Il se leva lentement, Judith toujours contre lui.

"C'est pas un nuage normal...." commença-t-il à mi-voix.

Si c'était bien ce que ça semblait être, ils allaient avoir de sérieux problèmes sous peu.
Il fit des yeux le tour du paysage.
Buissons, broussailles, arbres... partout où son regard se portait.
Et tout était, très, très sec.

Pour la toute première fois, Maggie put apercevoir une vraie anxiété dans le regard de Merle.

"Faut qu'on foute le camp d'ici. Le plus vite possible", annonça-t-il.

Il rangea le biberon et remit son sac à dos.

"On va chercher ces putains d'médocs, et on se grouille. On a un autre problème maintenant."

Il n'y avait pas beaucoup de choses qui faisaient vraiment peur à Merle, mais l'idée de mourir dans un incendie en faisait partie.
Non pas qu'il avait particulièrement la phobie du feu... mais il avait vu plusieurs fois à quoi ressemblait un feu de forêt. A quelle vitesse les flammes pouvaient progresser. Il avait vu des routes en macadam fondre sous l'effet de la fournaise, vu à quoi ressemblaient les cadavres d'animaux ayant été pris dans le feu.
Et après l'incendie de leur maison, à quoi ressemblait le cadavre de sa...

Non, définitivement, il n'avait pas la moindre envie de mourir comme ça.
Il était prêt à affronter tous les rôdeurs du monde, plutôt que ça.
Contre les rôdeurs, on pouvait se défendre.

Merle prit résolument le chemin de la prison, tout en tirant son poignard en renfort de sa baïonnette.
Il aurait préféré avoir le temps de réfléchir, d'établir une stratégie.
Ils n'avaient pas le temps.

Ils allaient devoir foncer dans le tas.

Heureusement, les Dixon étaient plutôt doués pour ça.

Lorsqu'il arriva à la lisière de la forêt et vit le nombre de cadavres ambulants qui se trainaient rien que dans le champ devant la prison, Merle faillit renoncer.
La première pensée qui lui traversa l'esprit fut "j'y arriverai pas."
Mais il se souvint ensuite de ce qui l'avait amené jusqu'ici, et qu'il portait même tout contre lui. Et l'odeur de la fumée dans son dos aussi.
Si Judith ne suffisait pas à constituer à elle seule une motivation suffisante pour avancer, le feu au cul venait achever de le décider.
Faire demi-tour n'était pas une option.

Il vit clairement Maggie se figer l'espace d'une seconde et hoqueter, le regard affolé.
Mais elle se maitrisa et ne montra pas davantage sa peur.
Il fallait admettre qu'elle avait un sacré courage, il le lui reconnaissait volontiers.
Elle avait du cran, pour une femme.
Il n'aurait jamais avoué qu'il se sentait soulagé de l'avoir à ses côtés... c'était pourtant le cas.

Merle lui fit signe de s'arrêter.
Tenter de traverser la horde de front aurait été suicidaire.
Il exposa à Maggie le plan qu'il avait en tête.

S'ils contournaient légèrement la prison tout en attirant un maximum de rôdeurs, ils pourraient utiliser la petite rivière, celle dans laquelle le groupe puisait précédemment l'eau, à leur avantage. Une fois le cours d'eau traversé, un grand nombre de rôdeurs s'y embourberait, trop nombreux pour franchir tous ensemble le petit pont. Les autres seraient ralentis par ceux qui pataugeraient dans l'eau, et cela leur donnerait un peu de temps pour franchir l'enceinte de la prison, en passant par la clôture que les morts-vivants avaient enfoncée quelques jours plus tôt. Rick et les autres l'avaient réparée à la va-vite, fixant le grillage à l'aide de cordes dont un couteau viendrait facilement à bout.

Si le plan fonctionnait, ils pourraient arriver à l'intérieur sans avoir à affronter trop d'ennemis.
Une fois dedans, par contre, le corps à corps serait inévitable.